P/1935.11.20 — André Malraux, préface au «Sang noir» de Louis Guilloux (1955)

P/1935.11.20 — André Malraux : Louis Guilloux, Le Sang noir, préface d'André Malraux, Paris, Le Club du meilleur livre, 1955, (coll. «Le Club du meilleur livre – romans»).

Déjà sous le titre «Le Sens de la mort», Marianne [Paris], 4e année, n° 161, 20 novembre 1935, p. 4.


 

André Malraux

Le Sens de la mort.

Préface au Sang noir de Louis Guilloux

 

Je ne crois pas à la critique des écrivains. Ils n'ont lieu de parler que de peu de livres; s'ils le font, c'est donc par amour ou par haine. Quelquefois pour défendre leurs valeurs, ou exposer dans une revue plus ou moins spécialisée quelque idée – ingénieuse née d'une lecture… Un critique professionnel s'engage parce qu'il parle de beaucoup d'ouvrages; et qu'il est contraint par-là à une hiérarchie; un romancier, non. Qu'il prenne donc sa position pour ce qu'elle est : faire aimer ce qu'il aime. Comme je l'ai fait pour Lawrence et pour Faulkner lorsqu'ils étaient encore à peu près inconnus en France, j'écris ici pour dire que j'aime un livre, et pourquoi.

Un livre qui a ses défauts. Quelques-uns de ceux de Faulkner, en particulier. Mais il suffit de lire les jugements des contemporains sur les plus grands écrivains pour comprendre le peu d'importance des objections, même fondées, lorsqu'il s'agit d'art. Le talent n'est pas le résultat d'une balance. Une œuvre ne vit pas d'autant plus (je ne dis même pas : plus longtemps) qu'elle est meilleure; elle vit ou meurt : l'art ne connaît pas de domaine négatif.

 

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