art. 150, janvier 2013 • Michaël de Saint-Cheron : «L’amitié Chagall Malraux» (PAM n° 2, 2001-2002)

L’amitié avec Marc Chagall fut l’une des plus précoces et surtout la plus longue qu’entretint avec un peintre André Malraux. Michaël de Saint-Cheron, essayiste, revient sur les liens qui unirent l’écrivain et le peintre entre 1924 et 1976 pour en dévoiler la nature et la profondeur.



Leur rencontre remonte à 1924, à la galerie Barbazange-Hodebert, à Paris. Cette amitié fut la plus longue de toutes celles que Malraux entretint avec un artiste – puisque seule sa propre mort devait l’interrompre en 1976. Braque était mort en 1963, Fautrier l’année suivante, tandis que l’amitié avec Picasso fut, quant à elle, assez malmenée par les deux hommes.

Ce demi-siècle d’amitié féconde, débuta donc en 1924, un an après le retour à Paris de Chagall, le 1er septembre 1923. Le peintre est alors âgé de trente-quatre ans et l’écrivain a quinze ans de moins. Le souvenir de cette première rencontre devait durablement marquer Chagall, qui l’évoqua au lendemain de la mort de Malraux dans sa lettre à Marcel Arland, qui fut publiée en juillet 1977 sous le titre «Hommage à André Malraux» dans La Nouvelle Revue française. L’artiste se souvint que chacun de ceux qui étaient à sa première exposition parisienne, d’Arland à Paulhan, s’exprimait sur les peintures qu’ils avaient devant eux. «Seul, Malraux regardait mais gardait le silence.»

S’il existe très certainement des lettres de cette époque, en particulier à Marcel Arland, où le jeune Malraux aurait écrit sur l’art de Chagall, nous ne les connaissons pas. Ce n’est qu’après guerre que l’admiration et la collaboration des deux créateurs purent se concrétiser en plénitude. Ce n’en est pas moins au cours de ces années 1924-1939 que Malraux comprit le génie du peintre, non sans s’étonner de la méprise dont son oeuvre eut à souffrir des années encore avant la pleine reconnaissance, qui eut lieu à partir des années 1950.

Le Chagall que découvre Malraux en 1924 est celui qui est encore profondément marqué par son Vitebsk natal. La période 1908-1922 en est le formidable écho. Le cubisme révolutionne la peinture et ne laisse aucun peintre indifférent. L’artiste que rencontre Malraux vient de réaliser trois ans plus tôt l’extraordinaire Décor du Théâtre juif de Moscou qui mettra quelque soixante-dix ans pour être révélé au monde. En contemplant les panneaux peints du vieux théâtre d’Art juif, on peut rêver de ce que Malraux en eût dit, s’il les avait connus. C’est là l’oeuvre d’un artiste d’une puissance incroyable, qui montre déjà son goût pour les grands espaces. Ces peintures préfigurent à la fois les décors pour le plafond de l’Opéra, que Malraux et le général de Gaulle commanderont à Chagall en 1963, et bien sûr, le Message biblique, mais aussi ses vitraux.

 

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© www.malraux.org / Présence d’André Malraux sur la Toile

Texte mis en ligne le 1er janvier 2013

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