D/1947.07.02 — André Malraux : «Discours prononcé au vélodrome d’Hiver», 1947

D/1947.07.02 — André Malraux : «Discours prononcé par M. Malraux au vélodrome d'Hiver le 2 juillet 1947». Sténotypie de 8 pages. (Archives de l'Institut Charles-de-Gaulle.)


 

André Malraux

 

Discours prononcé au Vélodrome d'Hiver le 2 juillet 1947

 

[…]

Cette idée centrale étant admise, il est bien évident que nous redirons que nous ne voulons pas de programme, mais que cela ne veut pas dire que nous ne savons pas où nous allons et surtout que nous n'avons pas d'objectif. Notre formule n'est pas que le Rassemblement est sans programme; notre formule est que le programme du Rassemblement, ce sont des objectifs.

Notre objectif dans l'ordre économique, c'est le rétablissement de tous les secteurs libres aussitôt qu'on peut le faire.

Notre objectif dans l'ordre social, ce sont les élections syndicales libres immédiatement. Notre objectif dans l'Union Française, il s'appelle simplement le choix : qu'un Gouvernement français évacue ou maintienne l'Indochine – et vous savez ce que nous pensons –, mais qu'on cesse une bonne fois, avec des ministres debout ou assis à leurs bancs, d'insulter par la voix de l'Etat les soldats que l'on envoie tuer.

Notre objectif politique, c'est de rétablir le jeu normal des partis ou des tendances car, là encore, que l'on s'entende bien : le général de Gaulle n'a jamais dit qu'il dissoudrait les partis; ce qu'il a dit, c'est qu'il était inadmissible qu'un ministre obéisse à son parti et non pas à la France, et qu'on finisse par remettre entre les mains du Comité central M.R.P., du Parti Socialiste ou du Parti Communiste, le destin de la France.

Tous les partis existent en tant que tendances, dans la mesure où ils représentent une coordination. Le général de Gaulle n'a jamais parlé de dissolution ou de ne pas dissoudre, mais de remettre en place le fonctionnement d'un organisme faussé et profondément détruit.

Dans l'ordre policier, et ceci est fort important, il faut bien nous dire que si nous sommes opposés au totalitarisme, c'est entre autres raisons parce qu'il a créé dans tous les pays où il existe ce que j'appellerai le quatrième pouvoir. Il n'est pas vrai que la Gestapo et le Guépéou soient une sorte de variante des polices que nous connaissons; ce n'est pas une police plus nombreuse, ce n'est pas comme le disent nos adversaires, qui savent très bien qu'ils mentent, une autre D.G.E.R. La D.G.E.R., que ceux qui l'ont vue se lèvent ! Il n'y en aura pas beaucoup; mais si nous disions à une salle russe : que ceux qui ont connu la Guépéou se lèvent : ils resteraient peut-être assis, mais il n'y aurait peut-être pas assez de place pour tous les fantômes jusqu'au-delà de cette nuit.

Dans l'ordre de la culture, la liberté de l'esprit est la vérité, au moins dans la mesure où elle est vérifiable.

Tels sont nos objectifs immédiats et précis; ils représentent ensemble une seule idée : la responsabilité au service de la liberté.

Je le précise bien : nous avons deux idées fondamentales, l'une est responsabilité, donc autorité, et l'autre est liberté, et il est bien entendu que la première est au service de la seconde. 

[…]

 

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malraux47