D/1960.06.24 — André Malraux : «Intervention à l’Assemblée nationale»

André Malraux, «[Intervention à l'Assemblée nationale, séance du 24 juin 1960]», intervention à la suite d'une question orale sans débat portant sur des «Films documentaires sur l'œuvre de la France dans les départements sud-méditerranéens». Journal officiel de la République française. Débats parlementaires. Assemblée nationale [Paris], n° 39 AN, 25 juin 1960, p. 1498 et 1499.


 

André Malraux

 

Intervention à l'Assemblée nationale, séance du 24 juin 1960

(Le cinéma français de propagande)

 

Mesdames, Messieurs, sur le premier point concernant la diffusion en France d'un film non désigné faisant l'éloge du régime collectiviste qui règne en Yougoslavie, je dirai que tout film, français ou étranger, notamment le film en cause, ne peut être exploité avant d'avoir été soumis préalablement à la commission de contrôle des films cinématographiques, créée en exécution de l'ordonnance du 3 juillet 1945, et d'avoir obtenu un visa d'exploitation qui est délivré par le ministre de l'Information chargé du contrôle cinématographique.

Il est évident que le film incriminé possède ce visa d'exploitation. S'il en était autrement, ce qui paraîtrait invraisemblable, il appartiendrait aux services compétents du ministère de l'Intérieur de saisir les copies du film.

Sur le second point, le délégué général du Gouvernement en Algérie dispose de certains crédits pour la réalisation et la diffusion de films exaltant l'œuvre de la France dans les départements algériens. Ces films sont diffusés dans les pays étrangers et amis, soit dans les théâtres cinématographiques, soit sur les chaînes de télévision.

Bien entendu, l'honorable parlementaire ne demande pas que ces films soient diffusés dans les pays étrangers, mais en France. S'il connaît un moyen de faire projeter dans tous les cinémas de France un film, quel qu'il soit, je lui serais obligé de me le faire connaître. Il va de soi que le ministère de tutelle du cinéma et même le Gouvernement ne disposent, dans le cadre de la législation actuelle, d'aucun moyen d'imposer des programmes aux exploitants.

Cela dit, comme il est évident que, si la question posée avait un caractère inutilement polémique, elle a aussi un caractère sérieux et légitime, je réponds : mettre en place un appareil qui permette, de Paris – et non pas d'Alger – de faire des films d'une qualité suffisante pour que, d'avance, les exploitants les prennent à la place des films qui exaltent les Yougoslaves, c'est éminemment souhaitable. C'est, vous le savez bien, Monsieur le Député, extrêmement difficile dans les conditions de la législation actuelle, et, spécialement parce que, pour le faire, il faut d'abord régler le problème de l'union générale cinématographique, à propos duquel vos amis ont approuvé la destruction des moyens d'Etat.

 

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