D/1961.11.21 — André Malraux : «Intervention au Sénat»

André Malraux, «[Intervention au Sénat, séance du 21 novembre 1961]», intervention au cours de la discussion du projet de loi de finances pour 1962. Journal officiel de la République française. Débats parlementaires. Sénat [Paris], n° 53 S, 22 novembre 1961, p. 1733-1735, 1735-1736, 1736, 1736-1737, 1737, 1738.

 


 

André Malraux

 

Intervention au Sénat – séance du 21 novembre 1961

(Financement, théâtre, cinéma, restauration de monuments, décentralisation, bilan)

 


 

Extrait 

 

Je ne voudrais insister que sur un point, auquel beaucoup d'entre vous ont fait allusion, c'est la question de la décentralisation et du régionalisme. N'oubliez pas ce qui a été fait : il y a eu la création de nouveaux centres, le développement des troupes théâtrales; des troupes vont devenir des centres; il y a les festivals, d'ailleurs trop nombreux, ce qui conduit à un éparpillement des moyens; il y a les écoles d'art et les écoles de musique en faveur desquelles un accroissement de la dotation est prévu pour la première fois depuis près de dix ans; il y a les Maisons de la culture; il y a la décentralisation dramatique et lyrique – elle est, dans son ensemble, mauvaise, et c'est là une autocritique – il y a l'augmentation du nombre des bourses d'études, bien sûr insuffisantes – 140.000 nouveaux francs attribués à ce titre sur un total de 200.000 – et enfin il y a l'accroissement des subventions aux musées classés et contrôlés.

Bien entendu, la décentralisation lyrique est à reprendre de fond en comble. Sur ce point, je vous rappelle amicalement que j'avais dit que rien de sérieux ne serait fait tant que nous n'aurions pas eu un entretien, avec un ordre du jour très précis, cet entretien réunissant la commission des Affaires culturelles du Sénat, les sénateurs-maires et moi-même. Vous en étiez tous tombés d'accord. Nous avions envisagé cet entretien : je ne dirai pas que j'y étais tout seul, mais je dirai qu'il y avait le sénateur-maire de Strasbourg, moi et un chat qui traversait nonchalamment la pièce (rires); ce n'était pas beaucoup.

Donc, disons que sur le fond des choses la politique de décentralisation doit être changée. Elle ne doit pas être changée exclusivement par mes services : premièrement, parce que la méthode serait mauvaise; deuxièmement parce qu'ils ont besoin de vous. Par conséquent, il est souhaitable que nous réunissions les sénateurs-maires et que nous fassions des propositions, que MM. les sénateurs-maires acceptent certaines de celles-ci, écartent les autres et que nous passions tout de suite à l'application de ce qui aura été accepté par tout le monde.

Je réponds maintenant à M. Balestra. Vous avez, Monsieur le Sénateur, une vue de l'ensemble des questions qui souvent m'intéresse beaucoup – par exemple, je ne pense pas que vous ayez tout à fait tort sur Manon ni tout à fait raison sur Les Troyens – et parfois m'intrigue, comme si ce point de vue était essentiellement le regret de ceux qui ne sont plus là en face des qualités et des faiblesses de ceux qui sont là.

Bien sûr, le théâtre lyrique n'est pas parfait; bien sûr, la Réunion des théâtres lyriques nationaux n'est pas parfaite. A qui le dites-vous ! Mais croyez-vous qu'elle était parfaite hier ? Croyez-vous qu'elle était parfaite il y a trois ans et demi ? Non. Alors, disons-nous : il faut faire ce que nous pouvons faire avec les moyens que nous avons et une certaine bonne volonté.

Ce bilan, je l'ai dit tout à l'heure, pour le théâtre dramatique je le trouve bon. Il n'est pas exact que la Comédie-Française soit dans une mauvaise position. Elle n'a jamais eu de meilleurs programmes, jamais eu tant de public, jamais tant gagné d'argent.

 

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