D/1965.12.15 — André Malraux : «Discours du Palais des Sports en vue de l’élection du Président de la République au suffrage universel»

«André Malraux : la République, de Gaulle et les politiciens», Notre République [Paris], n° 199, 24 décembre 1965, p. 7 et 8.


 

André Malraux

 

«Discours prononcé au Palais des Sports, le 15 décembre 1965,

à l'occasion de la campagne en vue de l'élection du

Président de la République au suffrage universel»

 

  Nous savons tous, et M. Mitterrand le premier, que pour le général de Gaulle, la gauche et la droite se définissent par ce que l'une et l'autre peuvent faire pour la France.

  Nous savons aussi que les associés de M. Mitterrand, devant le plus récent drame de notre histoire, celui de l'Algérie, ont passé leur temps à faire faire à la gauche la politique de la droite.

  Et nous savons enfin que, par deux fois, le général de Gaulle a failli être tué par cette droite même, Monsieur Mitterrand, qui vous apporte aujourd'hui ses voix, en raison, n'est-ce pas, de son passé hautement républicain !

  Si la gauche ne signifiait que la présence au gouvernement d'une équipe déterminée de politiciens, il n'y aurait pas même lieu d'en parler. Mais je crois, comme M. Mitterrand, que le mot gauche signifie, heureusement, autre chose que ceux qui s'en servent.

  D'abord, évidemment, la Révolution française. A tel point qu'il ne serait pas déraisonnable de dire qu'un homme de droite, c'est celui pour qui la Révolution signifie la guillotine, et un homme de gauche, celui pour qui elle signifie Fleurus. Comme chacun, j'ai entendu le petit couplet de M. Mitterrand à la liberté. Ce poujadisme sentimental semblait bien mince, en face d'un si grand héritage ! Pour nous, la gauche, c'est la présence, dans l'Histoire, de la générosité par laquelle la France a été la France pour le monde.

  Au musée mexicain de Puebla, l'instituteur me parlait de la France avec cette chaleur qu'on rencontre souvent dans les pays d'Amérique latine. Aux murs, il y avait des fresques qui représentaient les combats des zouaves contre l'armée révolutionnaire mexicaine.

  «Comment se fait-il, lui demandais-je, que, malgré cette guerre, vous ayez gardé tant d'amitié pour notre pays ?» Et il me répondit : «Voyez-vous, à l'école, chez nous, les gosses apprennent quelques phrases par cœur, pas beaucoup. Et parmi ces phrases, il y a la lettre de Victor Hugo au président Juarez – au moment des victoires de l'empereur Maximilien.» Or, cette lettre que tous les enfants mexicains connaissent par cœur, les enfants de France l'ignorent presque tous. La voici : «Si vous devenez vainqueur, Monsieur le Président, vous trouverez chez moi l'hospitalité du citoyen; si vous êtes vaincu, vous y trouverez l'hospitalité du proscrit.»

  La France, pour le Mexique, c'est cette lettre. Mais l'instituteur s'est précipité à Mexico pour aller y applaudir le général de Gaulle. Je ne crois pas qu'il s'y fût précipité pour y applaudir M. Mitterrand. Car il s'agissait de signification historique, et, pour l'Histoire, conquérir la liberté ne se conjugue pas au conditionnel. Un Mexicain trouve très drôle d'entendre attaquer un homme que toute l'Amérique latine appelle Libertador comme les fondateurs de ses républiques, par un homme qui n'a jamais rien libéré – et d'entendre parler d'une union des Républicains contre un homme qui a sauvé deux fois la République.

  Il y a des pays qui ne sont jamais plus grands que lorsqu'ils sont repliés sur eux-mêmes : l'Angleterre de Drake et celle de la bataille de Londres. Il y a des pays qui ne sont jamais plus grands que lorsqu'ils le sont pour les autres : la France des Croisades, celle de la Révolution. Sur toutes les routes d'Orient, il y a des tombes de chevaliers français; sous bien des champs de l'Europe occidentale, il y a des corps de soldats de l'an II. Un peuple ramassa l'épée de Turenne, lança à travers l'Europe la première armée de la justice, et pendant cent ans, cette armée en haillons emplit les plus nobles rêves du monde :

  «… Ils avaient chassé vingt rois, passé les Alpes et le Rhin, et leur âme chantait dans le clairon d'airain…»

  Qu'est-ce que vous et moi avons à faire, Monsieur Mitterrand, avec ces ombres immenses, qui firent danser l'Europe au son de la liberté ? Candidat unique des Républicains, de quel droit venez-vous vous prévaloir de Fleurus – vous qui n'étiez pas même en Espagne ? Vous avez été onze fois ministre de la IVe, vous auriez pu l'être de la IIIe, de la Seconde, peut-être. Ni vous ni moi n'aurions pu l'être de la Première.

  Candidat unique des Républicains, laissez dormir la République !…

  Cette République-là est morte avec le XIXe siècle. Mais non ce qu'elle portait en elle. C'est la volonté de justice – et d'abord de justice sociale. C'est la volonté d'indépendance nationale – pas le nationalisme : l'indépendance. C'est la volonté de liberté individuelle, que l'on feint de croire menacée. Que reste-t-il de ces volontés ? Aux yeux du monde, aux yeux de la France elle-même, non pas ce qu'on en dit, mais ce qu'on fait pour elle.

  Pour qu'il existât une gauche, il fallait d'abord – non ? – qu'existât la République. Le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'allait pas très bien, en 44. Ô mes compagnons, qui avez défendu Strasbourg un contre vingt, vous qui savez ce qui se serait passé en cette ville, déjà abandonnée par l'armée américaine, sans le général de Gaulle, avez-vous oublié qu'en ce temps, la République et le général de Gaulle étaient inséparables ? Qui vous eût dit qu'il serait un jour attaqué, au nom de cette torche que nous avons si douloureusement rallumée ensemble, par les éphémères qui ont mis douze ans à voleter autour ?

  La République exigeait un minimum de justice politique. Et d'abord, le vote des femmes. Les politiciens au pouvoir le refusaient encore aux femmes françaises, quand il était accordé aux femmes turques. Il était inévitable ? Oui – depuis vingt ans ! Le général de Gaulle a dit et fait ce que les politiciens disaient et ne faisaient pas.

  Puisque la résurrection de la France exigeait une autorité véritable, il fallait que cette autorité fût fondée sur le peuple, et que le président de la République fût élu au suffrage universel. Cette fois, il ne suffit pas de dire que les libertés ont été rétablies ou établies par le général de Gaulle. C'est au nom de cette liberté-là que vous êtes aujourd'hui candidat, Monsieur Mitterrand. Et elle n'a pas été seulement, comme les autres, établie sans vous : elle a été établie malgré vous, elle a été établie contre vous. En octobre 1962, au congrès des maires de Nièvre, vous déclariez que l'élection du président de la République par tous les citoyens dépossédait les élus de leurs droits.

  Dans le domaine social, il y a eu, depuis vingt ans, deux décisions capitales : les nationalisations, la Sécurité sociale. Qui les a prises ?

  Dans le domaine de justice humaine le plus dramatique depuis la guerre, celui de la décolonisation, le système auquel vous apparteniez était à la veille de faire de l'Afrique noire une immense Indochine – en face de l'Algérie où vos amis, Monsieur Mitterrand, n'avaient su ni faire la guerre ni faire la paix. La figure qui est aujourd'hui celle de la France depuis Brazzaville jusqu'à Alger – jusqu'à Alger ! – c'est celle de la droite ou de la monarchie, n'est-ce pas ? Et lorsque le président du Sénégal écrit : «De notre point de vue, c'est le général de Gaulle qui a une position socialiste révolutionnaire et ce sont ses adversaires qui ont une position conservatrice», c'est sans doute par respect du pouvoir personnel ! Au surplus, Senghor ne connaît pas l'Afrique !

  Enfin, il est sans doute antirépublicain que, pour la première fois depuis vingt-cinq ans, les soldats français ne se battent nulle part.

  Le général de Gaulle a donc rétabli la République, établi le droit de vote des femmes, l'élection du Président au suffrage universel, les nationalisations, la Sécurité sociale, les allocations familiales, les comités d'entreprise; réussi une décolonisation qui a rendu à la France son visage historique; résolu le terrible problème algérien, apporté la paix en menant la seule vraie lutte contre la seule droite meurtrière, celle du putsch d'Alger et du Petit-Clamart.

  Pendant ce temps-là, vous, qu'est-ce que vous avez fait ?

  Vous avez rêvé la gauche. Vous croyez que vous la faites quand vous parlez d'elle. Un ouvrier m'écrivait hier : «Dites bien que si moi je vote pour de Gaulle, c'est parce qu'avec lui on n'a pas les C.R.S. sur le dos, alors qu'avec Mitterrand, on les avait tout le temps !» Vous n'êtes pas le défenseur de la justice : chaque fois qu'elle a été tragiquement en cause, vous n'avez pas existé. Vous n'êtes pas le défenseur des libertés individuelles, qui ne sont nullement menacées. Vous n'êtes certainement pas le défenseur de l'indépendance nationale.

  Puisque vous ne symbolisez en rien une véritable action de la gauche, puisque vous ne symbolisez pas la République, et puisque, néanmoins, vous symbolisez quelque chose, que symbolisez-vous ?

  D'abord, le mélange de désir émouvant et d'inévitable démagogie qu'implique l'éternelle intention politique opposée à l'action politique. Il est plus facile d'accorder les électeurs sur le désir d'aller au ciel que de leur donner les moyens d'y aller. Vous croyez d'instinct que les écrasants d'obstacles de l'Histoire ont une solution parlementaire. Vous dites : «Si je suis élu, je dissous l'Assemblée, et je gouverne avec la majorité que dégageront les élections.» Bien. Vous espérez que cette majorité sera formée de voix semblables à celles que vous venez de rassembler. Supposons-le. Mais moins de la moitié de vos voix sont pour l'Europe intégrée, c'est-à-dire américaine; plus de la moitié, communiste, est contre. Il s'agit d'une question capitale, non d'un point de détail. Qu'y changera votre jeu parlementaire ? Couperez-vous la France en deux ? Ou en quatre, car vous êtes le candidat unique de quatre gauches – dont l'extrême-droite. Depuis que je vous écoute à la télévision, je m'aperçois que tous les problèmes que le général de Gaulle a posés comme des problèmes de l'Histoire, vous espérez les résoudre par des combinaisons, par des «contrats loyaux» (il y a des contrats déloyaux ?) avec tel ou tel parti. Mais la gauche de Jaurès, ce n'était pas une combinaison. Le choix auquel est appelé le pays, et qui n'est nullement entre la droite et la gauche, c'est un choix entre un homme de l'Histoire et les politiciens.

  Je n'ai rien contre les politiciens. Ils ne sont pas particuliers à la IVe République. Ils n'ont pas changé depuis la Grèce. En gros, ils forment, depuis des siècles, un club des négociateurs. Aux objectifs historiques – donc à long terme – ils substituent toujours l'objectif immédiat, c'est-à-dire, aujourd'hui, électoral. Le gouvernement que M. Mitterrand nous promet, c'est de l'histoire-fiction, comme il y a la science-fiction. Qu'est-ce que cette politique de gauche qui n'ose pas prononcer les mots «classe ouvrière»; qu'est-ce que cette autorité que s'arroge M. Mitterrand sur le Parti communiste ? Mais s'il avait la moindre autorité, le Parti communiste ne le soutiendrait pas, les chefs des autres partis, pas davantage ! Dans ce cache-cache où chacun attend l'autre au coin d'un bois, M. Mitterrand a le choix entre Daladier et Kerensky. Il n'y a pas d'union des gauches, le peuple entier le sait, les politiciens le proclameraient dès que le pouvoir serait atteint : l'objet réel de l'union, c'est l'élection.

  Je ne veux pas parler particulièrement d'intérêt, je veux parler d'une réalité historique plus profonde, que j'appellerai le compromis comme moyen naturel de gouvernement. La fin de la IIIe République en fut l'expression la plus dramatique, et la IVe l'expression la plus pitoyable. Lorsque, avant la guerre de 1940, il fallut concilier les défenseurs des divisions cuirassées et ceux des armes traditionnelles, on mit un demi-soldat dans un demi-char et le résultat ne se fit pas attendre. Cette conception du gouvernement n'a jamais résisté au danger de la patrie, depuis la Convention jusqu'à Clemenceau; elle ne résiste pas davantage à la transformation sans précédent de la civilisation, à laquelle sont confrontés les Etats modernes. Mais elle a conservé sa valeur électorale, parce qu'un programme commun concerne ce qu'on fera, non ce qu'on fait. Le génie du politicien, c'est de contourner l'obstacle. D'où sa singulière incapacité – comme en 1940 – à faire face au drame. D'où la nécessité où sont les politiciens d'inventer un monde imaginaire, dans lequel les obstacles réels – le sous-développement, les autres nations, la misère, la transformation sans précédent du monde – sont remplacés par un seul adversaire; l'adversaire politique, transformé en diable. La religion des Etats totalitaires, c'est le manichéisme épique; celle des politiciens, depuis bien longtemps, c'est le manichéisme électoral.

  C'est pour cela qu'il faut placarder dans le métro – ce que M. Mitterrand ne fait pas, mais d'autres le font à son profit – même s'il le réprouve, ce que je souhaite : «Si votre grand-père a soixante-quinze ans, lui confiez-vous vos affaires ?» Bon. Mais si vos enfants sont malades, les confiez-vous – maintenant c'est nous qui parlons – les confiez-vous au docteur Schweitzer, ou à un médecin de quarante-neuf ans qui a déjà tué onze malades ?

  C'est pour cela qu'il faut parler du pouvoir personnel, en confondant soigneusement l'autorité que la transformation des sociétés exige aux Etats-Unis comme en Union soviétique, comme en Chine, avec les pires souvenirs de la monarchie. Le général de Gaulle a déjà été Napoléon III. S'il devenait Louis XV ? ou XIV, XIII, XII, XI… Arrêtons-nous : surtout, pas Louis IX. Le chef fasciste d'avant-hier, le plébiscitaire d'hier, est mis en ballottage, ce qui arrivait tous les matins, n'est-ce pas, à Hitler et à Napoléon III ? Passons, passons… et M. Mitterrand, l'œil durement fixé sur le pauvre objectif ahuri de la caméra, nous dit, comme l'héroïque victime devant l'éternel bourreau : «A la volonté d'un seul homme, nous opposerons la volonté nationale !» avec l'accent des hommes de 89 proclamant les Droits de l'Homme – au moment même où il fait appel à cette volonté nationale grâce à un scrutin apporté par cette homme – et qui peut, dimanche, écarter cet homme en un jour.

  C'est une manœuvre enfantine, mais facile à analyser, que de jouer sur le sens des mots «pouvoir personnel» quand on a fait soi-même, onze fois – dont une au côté d'un homme de la valeur de Mendès France – l'expérience de l'impuissance imperson-nelle.

  C'est encore pour cela qu'il faut faire du général de Gaulle le portrait que vous en avez tracé hier, Monsieur Mitterrand, quand vous avez tenté de faire de lui un candidat allant séduire les députés. Vous oubliez bien vite. Il demandait à l'Assemblée les moyens de maintenir la République; elle, lui demandait les moyens de n'être pas jetée à la Seine par les parachutistes. En ces jours où vous ne voyiez dans le général de Gaulle qu'un solliciteur, j'ai vu heure par heure, soucieux de l'Etat, soucieux de la patrie, MM. Pflimlin et Guy Mollet. Nous ne voyons pas les choses de la même façon. L'Histoire non plus. Comme vous l'avez dit hier, avec ce merveilleux air de virginité politique et de modeste hauteur : «Les choses telles que les conçoit le général de Gaulle et que, moi, je ne les conçois pas…» Bergson professait : «N'écoute pas ce que je dis, regarde ce que je fais.» L'un de vos défenseurs éminents, M. le président Monnerville, publiait hier ceci : «Le choix est entre un pouvoir fondé sur le mépris des hommes et la démocratie ouverte du député de la Nièvre.» Ça ne vous fait pas rire ? Et : «Il faut rendre à la France sa vraie figure…»; oui, en supprimant l'aide aux pays sous-développés, n'est-ce pas ? Nous sommes quelques-uns à savoir la date après laquelle la France a repris son visage pour le monde…

  Dans ce domaine qui confond en permanence le souhaitable avec le possible, rien de plus significatif que l'idée que M. Mitterrand se fait de la création de l'Europe. On connaît la nôtre. J'ai dit depuis quinze ans, à une partie de ceux qui sont ici :

  «Depuis la grande voix de Michelet jusqu'à la grande voix de Jaurès, ce fut une sorte d'évidence, tout au long du siècle dernier, qu'on deviendra d'autant plus homme, qu'on serait moins lié à sa patrie. C'était alors la forme de l'espoir; Victor Hugo croyait que les Etats-Unis d'Europe se feraient d'eux-mêmes, et qu'ils seraient le prélude aux Etats-Unis du Monde. Le vrai prophète n'a été ni Michelet, ni Jaurès, ni Marx, si perspicaces dans d'autres domaines, mais bien leur ennemi Nietzsche, qui écrivait que le XXe siècle serait celui des guerres nationales. A l'heure de sa mort, le Géorgien Staline, élevé dans l'internationalisme, condamné pour internationalisme, regardant par les fenêtres du Kremlin tomber la neige qui ensevelit les Chevaliers Teutoniques et la Grande Armée, a eu le droit de dire : «J'ai refait la Russie…

  «Pour le meilleur comme pour le pire, nous sommes liés à la patrie. Et nous savons que nous ne ferons pas l'Europe sans elle; que nous devons faire, que nous le voulions ou non, l'Europe sur elle.»

  Rien n'a changé, dans ce domaine. Le général de Gaulle a montré hier combien il était difficile de faire l'Europe, combien il était nécessaire de partir du concret, en pleine conscience des obstacles qu'il impose. Croit-on les Anglais prêts à obéir à un président allemand de l'Europe, par la seule magie d'un bulletin de vote ? Cette Europe unie qui commencerait sans doute par la guerre de Sécession, c'est une fois de plus un désir. Et l'obstacle qu'elle rencontre n'est pas fait de mille ans d'Histoire, à leurs yeux, ni des passions les plus profondes, c'est le chauvinisme du général de Gaulle. Ce siècle sanglant aurait pu, cependant, montrer les limites de l'idéologie des âmes sensibles et de la déesse Raison.

  Résumons. Il s'agit de savoir où la France peut trouver la meilleure voie de son action, les meilleurs instruments de son destin.

  Il y a d'un côté, un fait historique. Accident, soit, puisque le général de Gaulle aurait pu être tué avant 1958, ou au Petit-Clamart. Un homme, chargé pour le monde entier de l'honneur que donne le souvenir de la plus grande fermeté dans le plus grand malheur, et uniquement soucieux du destin de la nation, a reçu des Français, depuis sept ans, la charge de ce destin. Il peut l'assumer encore, avec sa gloire et ses faiblesses. Tout ne va pas bien pour tous, loin de là. Et il ne s'agit pas de savoir si les choses continueront ainsi, il s'agit de savoir comment elles changeront pour devenir meilleures. Il s'agit de l'avenir. Si je ne me souviens pas que le général de Gaulle, en 1958, ait quémandé les voix des députés, je me souviens qu'il m'a dit, assez tristement, à l'hôtel Lapérouse : «Et peut-être aurais-je la chance de revoir une jeunesse française…» Cet homme a fait ce que personne, depuis bien longtemps, n'avait fait dans une démocratie : il a osé maintenir un plan d'austérité, au temps même de l'élection suprême, parce qu'il le jugeait nécessaire à la nation.

 

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