D/1971.12.05 — André Malraux à la télévision : «Jean Kay est un homme qui s’est conduit noblement»

Dossier de presse concernant Jean Kay (27 documents), document n° 9 :

 

Titre ? date ? (5 ou 6 décembre 1971 ?)

«Jean Kay est un homme qui s'est conduit noblement.», a déclaré M. André Malraux [à la télévision].

Après avoir reconstitué son acte, de «piraterie» aérienne dans l'après-midi du 4 décembre à Orly, Jean Kay a été présenté à M. Marcel Fourgeaud, juge d'instruction à Corbeil (Essonne), qui lui a notifié les quatre chefs d'inculpation suivants : séquestration de personnes dans le but de réaliser un détournement d'avion; prise d'otages; port d'arme et tentative d'homicide volontaire.

Jean Kay a été ensuite placé sous mandat de dépôt et écroué à la prison de Fleury-Mérogis.

Interviewé samedi soir sur la première chaîne de télévision, M. André Malraux a déclaré que Jean Kay était «un homme qui s'était conduit noblement», «et il n'y pas foule», a ajouté M. Malraux.

De plus, a estimé M. André Malraux, «ce problème, depuis hier, n'est plus très sérieux…à cause du drame. Si vraiment il y a la guerre (entre l'Inde et le Pakistan), arrêter ou ne pas arrêter un avion, c'est sympathique, et voilà».

A la remarque que Jean Kay avait affirmé avoir agi inspiré par ses dernières déclarations sur le Bangla-Desh, M. André Malraux a répondu : «C'est son droit. S'il veut dire que son acte – c'est-à-dire l'aide aux malheureux du Bangla-Desh – a été inspiré par mon discours, il me fait beaucoup d'honneur.» M. Malraux a précisé toutefois qu'il n'avait jamais préconisé un acte semblable avec en outre l'usage d'armes.

 

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Chronologogie des faits :

document n° 16

Journal de Morlaix, 9 octobre 1973

Jean Kay, pirate de l'air et défenseur du Bengladesh

Jeudi devant les Assises

 

Avant même d'examiner en détail les faits qui lui sont reprochés, les jurés devront cerner la personnalité de Jean Kay.

Agé de 28 ans au moment des faits, il n'a rien de l'accusé type de la cour d'assises. Né en Algérie d'un père colonel, privé de sa mère très jeune, ballotté au hasard des garnisons de son père. Jean Kay est très tôt préparé pour l'aventure.

• Rejoindre l'O.A.S.

En 1962, à Alger, il déserte pour rejoindre l'O.A.S. Après avoir purgé six mois de prison à la Santé et à Fresnes comme détenu politique, il déserte une nouvelle fois pour rejoindre un groupe de commandos en Espagne. Peu après son amnistie, en 1965, il part successivement combattre pendant quatre ans au Yémen puis comme mercenaire au Biafra, enfin comme instructeur des Phalanges libanaises.

Fin 1971, alors qu'il se trouve en France, la guerre fait rage au Pakistan. M. André Malraux, pour qui Jean Kay nourrit une grande admiration, envisage alors de prendre part à une opération destinées à secourir les dix millions de Bengalis du Pakistan oriental, réfugiés en Inde.

• Le [vendredi] 3 décembre 1971

Le 3 décembre 1971, à 11h45, un Boeing 727 de la Pakistan International Airlines vient de gagner la piste d'envol de l'aéroport d'Orly. L'avion s'apprête à partir pour Calcutta avec à son bord 28 passagers et huit membres d'équipage, quand soudain l'un des passagers fait irruption dans le poste de pilotage. C'est Jean Kay.

D'une main il brandit un pistolet 9 mm, de l'autre, il tient une sacoche de cuir d'où pendent deux fils électriques.

«Il y a une bombe dans cette serviette. Elle peut sauter d'une minute à l'autre», affirme le pirate solitaire avant d'ordonner à la tour de contrôle : «Cet avion est réquisitionné au profit des réfugiés du Bengla Desh. Faites déposer au pied de la passerelle 20 tonnes de médicaments, en priorité des vaccins, des antibiotiques et des vitamines. Vous avez deux heures pour exécuter les ordres. Passé ce délai, je ferai sauter l'appareil et ses passagers»

A 17h, les médicaments sont apportés au pied de l'avion. Au sol, le préfet de l'Essonne dirige les opérations auxquelles participent 200 gendarmes et 100 policiers. A l'intérieur de l'avion, Jean Kay fait diffuser de la musique et distribuer des bonbons.

Vers 15h30, depuis la tour de contrôle un policier qui affirme être médecin fait savoir au pirate qu'il est impossible de charger les vaccins dans les soutes de l'avion où la température descend à moins 15 degrés en altitude. Jean Kay accepte de faire alors ouvrir les portes du Boeing pour procéder au chargement.

Peu avant 19h30, cinq manœuvres vêtus de bleu de travail, chargent les premières caisses de médicaments. Ce sont des policiers armés. A la première occasion, l'un d'eux. M. Antoine Sciblol, se précipite sur Jean Kay et lui porte un violent coup de crosse sur la tête. Dans la confusion le pirate a tiré un coup de feu. Le projectile est allé trouer le pull-over du policier heureusement équipé d'un gilet pare-balles.

C'est ce coup de feu qui vaut à Jean Kay d'être également inculpé de tentative d'homicide volontaire.

• André Malraux cité comme témoin

Bezio, procureur de la République de Versailles, occupera jeudi le banc du ministère public. Mes Avraut et Tardif, défenseurs de Jean Kay, demanderont la relaxe de leur client «avant tout soucieux de la misère humaine».

Ils ont décidé de citer à titre de témoins, M. André Malraux, l'ambassadeur de Bangla Desh à Paris, le général Vanuxen et M. Raymond Offroy, député de Seine-Maritime, président du groupe parlementaire pour l'amitié entre la France et le Bengla Desh.

Pour le détournement et la prise d'otages Jean Kay encourt une peine de cinq à dix années de réclusion. Pour la tentative d'homicide volontaire il risque la réclusion à perpétuité.

NDLR. Jean Kay sera condamné à 5 années de prison avec sursis.

 


 

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