Marius-François Guyard, éditeur de Malraux dans la Pléiade (tomes II et III), est mort, le 5 mai dernier, à l'âge de 91 ans.
Je tiens à rendre hommage ici à cet éminent professeur à la Sorbonne, qui fut mon directeur de thèse et qui m'honora ensuite d'une amitié fidèle et attentive.
Marius-François Guyard avait de brillantes références universitaires mais, gaulliste convaincu, il avait effectué une partie de sa carrière dans la haute administration (comme Recteur d'Académie notamment). Son Malraux était, naturellement, le Malraux d'après 1945. Ce n'était pas celui qui m'intéressait le plus, mais M. – F. Guyard croyait à la continuité de l'œuvre ; l'intelligence et la lucidité avec lesquelles il la lisait m'ont beaucoup éclairé. Il avait, au tout début des années 1970, édité, dans la Pléiade également, les œuvres de Lamartine et, à l'instar d'Henri Peyre, entre autres, il voyait dans le premier Malraux un épigone de ces grands romantiques « engagés » qu'il admirait sincèrement.
Marius-François Guyard était un catholique pratiquant, grand ami de René Rémond, son camarade de promotion. Sa lecture de Malraux s'appuyait aussi sur une vaste culture religieuse et, lors de nos rencontres, il trouvait toujours quelque biais pour s'amuser, paternellement, du petit protestant rustre et ignorant que le hasard avait jeté entre ses griffes.
Marius-François Guyard était toujours élégant, brillant, distingué sans affectation, comme par fidélité à l'image, depuis longtemps passée, qu'il se faisait de la Sorbonne et de la Rue d'Ulm. Dans les dernières années de sa vie, la maladie et la vieillesse l'avaient durement frappé mais, en 2008, presque aveugle, il avait encore trouvé la force de participer au colloque organisé à la Sorbonne sur Le Miroir des limbes. Les lecteurs actuels et à venir de Malraux ne doivent pas oublier l'importance de sa contribution à l'intelligence de cette œuvre.
Jean-Claude Larrat