Journées d'études préparées par Myriam Sunnen
20-21 mars 2026
Appel à communications
Journées d'études «Malraux, la F/francophonie et les francophones» : Bibliothèque nationale du Luxembourg, 20-21 mars 2026
C'est en vain que l'on cherche, dans les deux dictionnaires consacrés à André Malraux1, des notices dédiées à la « francophonie », que le mot soit orthographié avec un f majuscule et désigne l'institution regroupant les pays ayant le français « en partage2 » ou qu'il porte la minuscule et renvoie à l'ensemble des locuteurs pratiquant cette langue. A priori surprenante si l'on considère l'engagement du ministre de Charles de Gaulle en faveur du « rayonnement culturel de la France3 » ainsi que la place non négligeable de l'Afrique francophone dans Le Miroir des limbes, cette absence s'explique pourtant par plusieurs facteurs, dont, en premier lieu, la polysémie du terme « francophonie », qui, d'après les organisateurs d'un récent colloque, susciterait une « relative indifférence » dans le « champ scientifique4 », alors même qu'il déclenche aussi des débats animés, portant parfois sur l'« existence même5 » de l'objet qu'il désigne. Si l'on sait par ailleurs que l'organisation de la recherche et de l'enseignement supérieur tend à séparer littérature française et littérature francophone et que Malraux n'a que rarement employé le terme « francophone », on comprend que les spécialistes attentifs à la présence de l'Afrique dans son œuvre se soient surtout concentrés sur les développements consacrés à la « négritude » (voir le discours prononcé à Dakar en 19666), à sa rencontre avec la reine Sebeth7 ou à celle avec les peintres haïtiens rapportée dans L'Intemporel ainsi que sur les réflexions que lui inspirent l'art africain et en particulier les fétiches, qui, d'après certains passages des Écrits sur l'art, remettraient en question l'existence même du «musée imaginaire8 ». Même si, à Niamey, le 17 février 1969, il a prononcé un discours lors de la conférence aboutissant, le 20 mars 1970, dans la même ville, à la création de l'Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), considérée comme l'ancêtre de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF)9, et en dépit du soutien qu'il a apporté à l'un des « Pères fondateurs » de cette organisation, Léopold Sédar Senghor, Malraux n'a pas joué de rôle-clé dans la construction de la Francophonie. La dimension politique inhérente à celle-ci n'a d'ailleurs pas été encouragée par le général de Gaulle10.
1 Dictionnaire André Malraux, dir. par Charles-Louis Foulon, Janine Mossuz-Lavau et Michaël de Saint-Cheron, avec la collab. d'Azis Bennis, Paris, CNRS Éditions, 2011 et Dictionnaire André Malraux, dir. par Jean-Claude Larrat, Paris, Classiques Garnier, 2015.
2 D'après la formule consacrée, notamment depuis la première Conférence des chefs d'État et de gouvernement des pays ayant le français en partage.
3 André Malraux et le rayonnement culturel de la France, éd. par Charles-Louis Foulon, Bruxelles, Éditions Complexe, 2004.
4 Voir « F/francophonie(s) : débats locaux, enjeux globaux », appel à contributions, Calenda, publié le 23 mai 2023, consulté le 25 mars 2025 sous https://doi.org/10.58079/1b79.
5 Ibid.
6 Texte publié dans André Malraux, Œuvres complètes, vol. V, Écrits sur l'art, t. II, publié sous la dir. d'Henri Godard, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2004, p. 1181-1189.
7 Voir Raphaël Lambal, « La rencontre de Malraux et de la reine Sebeth », Revue d'histoire littéraire de la France, no 105, 2005, p. 1009-1019.
8 Voir les travaux de Jean-Pierre Zarader et en particulier « Les “Primitifs” interrogent “le Musée imaginaire” », Présence d'André Malraux, no 17, 2020, Malraux et l'Afrique noire, éd. par Jean-René Bourrel, p. 119-132.
9 Un dossier sur Malraux, la Communauté française et la Francophonie est disponible sur le site malraux.org sous : https://malraux.org/?s=communaut%C3%A9&submit=Chercher; Télécharger ici le texte du discours.