Pourquoi donc historiens et journalistes se sont-ils acharnés durant tant d’années à dénoncer chez Malraux un prétendu goût à «prendre la pose», allant jusqu’à douter de son réel engagement en Espagne, par exemple ? Le numéro 417 de «L’Histoire» revient très brièvement sur sa participation à la Guerre civile espagnole pour préciser que «les témoignages abondent, qui attestent l’authenticité d’une action qui ne manqua ni de lucidité ni de bravoure». N’est-il pas temps d’écrire enfin une biographie de Malraux fidèle aux sources dont nous disposons et dépourvue de tout parti pris ?
Dans le n° 429 (novembre 2016) de L’Histoire, la rubrique «Forum : vous nous écrivez» évoque ce texte. On y lit : «Miguel Peciña Anitua revient sur l’encadré de Pierre-Jean Martineau “Le cas Malraux” p. 41 : “L’auteur aurait pu égratigner davantage le mythe. Le colonel de l’escadrille ‘España’, l’auteur du roman L’Espoir n’a jamais piloté un avion et il était un piètre tireur de mitrailleuse. Bien sûr, Malraux le mirobolant – c’est indéniable – avait du charisme et du courage, néanmoins… quel mythomane !» (P. 4.)
On ne fait pas mieux en suivisme intellectuel (Emmanuel Todd, Pol Vandromme) et en sottise de lecture (croire qu’un roman se lit comme une biographie). Notons que jamais Malraux n’a prétendu piloter d’avion ou avoir atteint une cible au moyen d’une mitrailleuse.
Pourquoi considérer que la mythomanie du jeune Malraux et que quelques mensonges par omission des années 40 doivent invalider son engagement espagnol ? Autant considérer que l’antisémitisme de Céline ne peut que rendre mauvais ses grands romans ou qu’un borgne ne peut écrire que la moitié d’un livre. (clp)