Rétrospective Paul Klee à Beaubourg, jusqu’au 1er août 2016

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Tous les fervents du sphinx Malraux ont en mémoire cette admirable page des Voix du Silence  (1950, p. 637 ) :

« L'art ne délivre pas l'homme de n'être qu'un accident de l'univers ; mais il est l'âme du passé au sens où chaque religion antique fut une âme du monde. Il assure pour ses sectateurs (partisan d'une secte), quand l'homme est né à la solitude, le lien profond qu'abandonnent les dieux qui s' éloignent. Si nous introduisons dans notre civilisation tant d'éléments ennemis, comment ne pas voir que notre avidité les fond en un passé devenu celui de sa plus profonde défense, séparé du vrai par sa nature même ?. Sous l'or battu des masques de Mycènes, là où l'on chercha la poussière de la beauté, battait de sa pulsation millénaire un pouvoir enfin réentendu jusqu'au fond du temps. A la petite plume de Klee, au bleu des raisins de Braque, répond du fond des empires le chuchotement des statues qui chantaient au lever du soleil. Toujours enrobé d'histoire, mais semblable à lui-même depuis Sumer jusqu'à l'école de Paris, l'acte créateur maintient au long des siècles une reconquête aussi vieille que l'homme. Une mosaïque byzantine et un Rubens, un Rembrandt et un Cézanne expriment des maîtrises distinctes, différemment chargées de ce qui fut maîtrisé ; mais elles s'unissent aux peintures magdaléniennes dans le langage immémorial de la conquête, non dans un syncrétisme* de ce qui fut conquis. La leçon des Bouddhas de Nara ou celle des Danses de Mort çivaïtes n'est pas une leçon de bouddhisme ou d'hindouïsme ; et le Musée Imaginaire est la suggestion d'un vaste possible projeté par le passé, la révélation de fragments perdus de l'obsédante plénitude humaine, unis dans la communauté de leur présence invaincue. Chacun des chefs-d'œuvre est une purification du monde, mais leur leçon commune est celle de leur existence, et la victoire de chaque artiste sur sa servitude rejoint, dans un immense déploiement, celle de l'art sur le destin de l'humanité.»

Et c’est précisément ici que Malraux énonce l’une de ses formules les plus mal comprises et les plus détestées des historiens de l’art, à une ou deux pages de cet ironique Crâne de cristal de roche (art aztèque).

«L’art est un anti-destin».

 

André Malraux, Œuvres complètes, t. 4, (Les Ecrits sur l’art, t. 1), Galliamard, 2004, p. 894. 

 

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Steps, 1929. Huile et encre à la plume sur toile. Tate Modern London.

Présentation du miracle, 1916. Gouache, stylo et encre sur tissu monté sur carton. Emmanuelle Lequeux note à propos de cette peinture : «Le philosophe Walter Benjamin, disait avec Klee, pourvoir “se reposer les yeux fermés”. Il a longtemps vécu avec cette œuvre que lui a offerte sa femme.» (Beaux-Arts Magazine, mai 2016, p. 92.

Portail d’une mosquée, 1931. Plume et aquarelle sur papier et carton. Musée Berggruen, Berlin.