art. 68, décembre 2009 • Moncef Khémiri : «André Malraux et le maniérisme : de la fin du cosmos médicéen à l’avènement du romanesque mythologique» (2004)

 

N'est-ce pas étonnant de la part d'un écrivain dont l'œuvre romanesque et autobiographique est surtout marquée par le double sceau de l'héroïque et du tragique, de manifester tant d'intérêt pour un art si peu soucieux de grandeur et d'interrogation métaphysique que le maniérisme ? Pourquoi en effet Malraux, après avoir exalté la figure de l'«aventurier épique», «affranchi la condition humaine» (L’Irréel, p. 167-168), si puissamment incarnée par l'impressionnante statue équestre du Gattamelata de Donattello ou par celle du Colleoni de Verrocchio, a-t-il fait une si large place dans son essai L'Irréel (1974), à des peintres comme Jules Romain, Pontormo, Le Rosso ou Le Primatice, dont les œuvres sont connues par leur sensualité, leur fantaisie et leur irréalisme. Est-ce uniquement par souci de respecter l'ordre chronologique adopté dans La Métamorphose des dieux, et de traiter avec la même impartialité les différentes écoles artistiques qui se sont succédé à l'époque de la Renaissance qu’il a consacré le chapitre VI de L'Irréel au maniérisme ? Cela est peu probable car l'auteur a souvent affirmé qu'il n'écrivait pas une histoire de l'art et qu'il n'entrait dans son propos aucune intention de raconter l'histoire de la formation des écoles picturales et encore moins de relater «les vies des plus excellents peintres», à la façon de Vasari. Mais quand bien même il aurait sacrifié à l'histoire de l'art, rien ne l'obligeait cependant à parler des maniéristes dans termes aussi élogieux. Quel est donc le secret de cet intérêt de l'auteur pour les peintres maniéristes et pour l'Ecole de Fontainebleau en particulier ?

 
Lire la suite : télécharger le texte.
 
 © www.malraux.org
Première publication de l’article :
 
Moncef KHEMIRI : «André Malraux et le maniérisme», suivi d'un entretien avec Jean-Paul Ledeur, in Ecriture et Peinture au XXe siècle, textes réunis et présentés par Moncef Khémiri. Paris-Tunis, Maisonneuve et Larose / Sud-Editions, 2004, p. 79-101.