art. 75, janvier 2010 • Henri Godard : «Le Parthénon mérite ses marbres» (2009)

Henri Godard : «Disséminées au Louvre et au British Museum, les sculptures originales du célèbre monument de l’Acropole doivent être restituées à la Grèce. Le Parthénon mérite ses marbres», article paru dans Le Monde du 14 septembre 2009.
 


Tous les amateurs de l'art grec qui étaient attachés à l'ancien Musée  d'art archaïque situé sur l'Acropole même (Athènes) attendaient avec impatience sa réouverture dans les nouveaux locaux situés en contrebas, spécialement conçus et construits pour lui, et agrandis. Le musée a été inauguré le 20 juin et c'est une grande réussite.

Toute la statuaire trouvée dans le sol de l'Acropole se trouve ici réunie, sans séparation ni cloisonnement, dans une seule grande galerie ouverte à ses deux extrémités. Les fameuses koraï (statues je jeunes filles debout), enterrées à la suite de l'invasion perse de 480 avant Jésus-Christ et ainsi préservées jusqu'à leur redécouverte à la fin du XIXe siècle, sont toutes là, distribuées dans cet espace d'un seul tenant, irrégulièrement et pourtant selon un ordre chronologique et esthétique qui n'a pas besoin de s'afficher pour convaincre : jamais n'a été aussi évidemment incarné ce qu'André Malraux nommait le «peuple des statues». Quelque part parmi elles, rapprochées l'une de l'autre, les deux sculptures qui sont les références majeures de ce même Malraux dans les pages si neuves qu'il a consacré à l'art grec dans La Métamorphose des dieux en 3 volumes (Gallimard, 1974-1977) : la korê d'Euthykidos («boudeuse») et l'Ephèbe blond, dans les yeux duquel il lisait une mise en question du monde et de la vie, innovation absolue de la pensée grecque.

Mais la grande révélation est celle de l'étage supérieur, ouvert sur l'extérieur de quatre côtés par de grandes baies vitrées et tout entier occupé en son centre par une construction rectangulaire. D'un plan homologue à celui de la partie haute du Parthénon, elle est destinée à l'exposition de tous les éléments qui subsistent de sa décoration : figures en ronde-bosse des deux frontons, métopes de la frise dorienne, frise ionienne continue dont les plaques jointoyées représentent en bas-relief la procession de jeunes Athéniens et Athéniennes lors de la fête des Panathénées.

Or, des éléments qui ont survécu aux destructions de vingt-cinq siècles d'accidents naturels et de brutalités de l'histoire, la Grèce ne possède plus qu'une très petite partie. Les voici, ces quelques figures, ces quelques métopes et ces quelques plaques de la frise, visibles désormais à hauteur de regard et mise en valeur à la place qu'avait chacune dans le dispositif d'ensemble. Lorsque, en fin de matinée, on parcourt le long côté sud de la construction, la magnifique lumière de la Grèce dore ces éléments originaux, réfléchie alors par le flanc de l'Acropole et, d'un peu plus haut, par le Parthénon lui-même.

Elle sculpte les figures taillées dans le marbre du Pentélique. Entre celles-ci, tous les autres éléments, de loin les plus nombreux, dont les originaux sont sortis de Grèce, sont représentés ici aux emplacements qui leur étaient destinés par des moulages de plâtre dont cette même lumière ne fait qu'accentuer la désespérance blancheur. Les sculptures originales sur lesquelles ont été réalisés ces moulages sont, quant à elles, dispersées dans diverses villes européennes, la grande majorité à Londres, au British Museum, et trois à Paris, au Louvre.

 

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