Image of E/1975.03.22 — «“Je ne suis ni peintre ni sculpteur” disait-il cinq siècles plus tôt. André Malraux commente pour cet anniversaire la biographie de Michel-Ange», «Paris-Match», 22 mars 1975, n° 1347, p. 46, 59 et 75.

E/1975.03.22 — «“Je ne suis ni peintre ni sculpteur” disait-il cinq siècles plus tôt. André Malraux commente pour cet anniversaire la biographie de Michel-Ange», «Paris-Match», 22 mars 1975, n° 1347, p. 46, 59 et 75.

Les textes en italique sont tirés d'une conversation exclusive accordée à Paris-Match par André Malraux.

 

«Michel-Ange est un colosse, mais ce n'est pas lui qui est la ligne de partage des eaux de l'art occidental : c'est Donatello. C'est Donatello qui a inventé le premier, au XVe siècle, de dresser une statue au milieu d'une place. Rome, évidemment, l'avait inventé d'abord avec la statue équestre mais on l'avait oublié. Et lorsque celle-ci reparaît, il se passe quelque chose de capital. Avant, il y avait bien deux statues équestres à Paris : elles étaient toutes deux dans Notre-Dame. Comme à Venise.

«C'est que la cathédrale joue, pour les statues, le rôle du fond des icônes byzantines. Si vous arrachez le sourire de Reims à la cathédrale, il faut le mettre au musée. Mais, pour que ce soit un ange, il lui faut la cathédrale. Quand l'Occident trouve normal qu'il y ait une statue isolée sur une place, tout l'art change : jusque-là, il n'existait pas ce que nous appelons une statue. C'est très frappant parce que, lorsque les Flamands ont commencé à peindre, ils ont peint dans les cathédrales. Le décor de leur crucifixion, ce n'est pas le Golgotha, c'est la cathédrale. La peinture commence dans l'église. Mais on sent qu'elle va s'en détacher : le donateur commence donateur et finit portrait

C'est dans ce monde nouveau que va apparaître Michel-Ange.

«J'ai le sentiment du possédé. Je ne peux pas penser à lui biographiquement. Les choses qui lui adviennent, adviennent. Elles ne m'étonnent jamais. Il est dans sa nature de se faire casser le nez, enfant, de se disputer rageusement avec le pape. Il a un côté fou génial, mais ses extravagances ne me surprennent pas. La colère fait certainement partie du personnage.»


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