Texte repris du hors-série n° 1 de Présence d'André Malraux, 2004 : actes de la journée d'étude consacrée à «Malraux et l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France», BNF, 23 mai 2013.
Isabelle Balsamo
Métamorphoses d'André Malraux dans le souvenir des premiers responsables régionaux de l'Inventaire général
Les témoignages oraux des responsables historiques de l’Inventaire général, recueillis en 1998, offrent à Isabelle Balsamo, conservateur en chef du patrimoine à l’Inspection générale des musées, l’occasion de saisir sur le vif un portrait diffracté et inédit de Malraux. L’étude met ainsi au jour l’action propre des images superposées du ministre, du romancier et de l’écrivain d’art sur les pionniers de l’Inventaire général et sur la représentation de leur mission, conçue, bien plus que comme une opération d’enregistrement administratif, comme «une aventure de l’esprit».
Avant Dans cette journée consacrée à explorer la personnalité d’André Malraux et son œuvre sous des aspects inédits, il a paru utile de revenir sur son rôle dans la création en 1964 d’un grand inventaire artistique national, «l’Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France». Depuis une dizaine d’années, à l’occasion de colloques anniversaires ou de séminaires tels ceux du comité d’histoire du ministère de la culture, les circonstances administratives et politiques de la création de l’Inventaire ont déjà été retracées, et la figure historique du ministre et son œuvre politique bien étudiées à l’aide des archives administratives du ministère. L’angle d’approche que je propose aujourd’hui est complètement différent : il vise à reconstituer l’image de Malraux, dans toute sa complexité, avec les facettes, voire les déformations, telles qu’elles apparaissent dans la mémoire des premiers protagonistes des services de l’Inventaire. En opérant un double déplacement, dans le temps – à partir de la matière fugace des souvenirs et des témoignages, et dans l’espace – en s’éloignant de Paris pour prendre le point de vue de la province, l’objectif de cette intervention sera d’écouter et d’interpréter la mémoire des fondateurs, en tentant d’analyser ce qui s’est passé dans les débuts et comment s’est joué là un moment déterminant pour le développement futur du service, et les prémisses de sa légende.
L’ambition peut paraître démesurée, sauf à grands frais de recherches dans les presses locales des années soixante, ou dans les archives de services régionaux de l’inventaire. De fait, elle est servie par une source neuve, dont je voudrais montrer ici tout le potentiel, et dont l’exploitation restera à faire : il s’agit d’une collecte de témoignages oraux réalisée au cours du deuxième semestre de 1998, auprès des responsables historiques de l’Inventaire général. Au moment où les institutions nationales du service se transformaient avec la disparition de la commission nationale, après celle des commissions régionales, il avait paru utile que le comité d’histoire du ministère rassemble les matériaux pour l’histoire de ce moment, en remontant jusqu’à ses sources et en s’intéressant plus précisément à deux aspects regardés comme novateurs, l’implantation des services dans les régions et la rénovation de l’histoire de l’art à partir de l’étude des provinces. Grâce à l’appui de son président, Augustin Girard, et de la secrétaire générale, Geneviève Gentil, une première campagne d’enregistrements fut programmée en 1998 – ou du moins ce que nous pensions, Francine Arnal et moi-même, être la première, car une suspension nous priva de la 2e tranche espérée et de plusieurs entretiens d’importance, notamment celui de Monsieur Martin-Demézil, disparu peu après.
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Texte mis en ligne le 11 juin 2016
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