Image of «Malraux veut faire des “paradores” français», «Paris Match», n° 1035, 8 mars 1969,  p. 6.

«Malraux veut faire des “paradores” français», «Paris Match», n° 1035, 8 mars 1969, p. 6.

«Ces choses mortes, il faut les rendre vivantes et pour cela leur donner des destinations qui leur apportent la vie».

Celui auquel s'adresse André Malraux est un homme affable de petite taille, d'une soixantaine d'années. C'est le président de la Caisse nationale des monuments historiques. M. Cadet, en bon connaisseur, siège rue Saint-Antoine, dans le célèbre hôtel de Béthune-Sully. Il sait ce qu'il y a derrière la phrase du ministre et s'en réjouit : le lancement en France des «Paradores» comme ceux (une centaine) qui existent en Espagne depuis 1928.

Le projet consiste à restaurer des demeures historiques plus ou moins en ruines, de les transformer en hôtels-restaurants ou en centres culturels pour permettre aux Français de passer quelques jours dans l'atmosphère et le cadre des siècles passés. Déjà, on loue des abbayes et des châteaux. Pour 2.500 francs la soirée, par exemple, on peut donner une réception dans les appartements du comte d'Artois, au château de Maisons-Laffitte; pour 9.500 francs la journée, on peut même avoir tout le château. Mais M. Cadet veut, comme André Malraux, aller plus loin et voit à travers l'opération «Paradores» un moyen de démocratiser la culture.

 

L'hôtellerie en profitera

Les hôteliers français ont eu vent du projet et aussitôt s'inquiètent.

«L'Etat n'a pas le droit de concurrencer l'hôtellerie française», s'écrient-ils !

«Le problème n'est pas là, répondent les Monuments historiques. Notre vocation n'est pas commerciale. Nous voulons sauver un certain nombre de «petits chefs-d'œuvre en péril».

Notre but est de faire revivre des demeures anciennes et avec elles des régions délaissées. L'hôtellerie, la culture, le tourisme ne peuvent qu'en profiter. Un exemple : en Espagne, le célèbre parador de San Francisco, à Grenade, n'a que 20 à 30 chambres. Autour, il a fallu construire des hôtels dont «l'Alhambra Palace» qui est lui aussi devenu un pôle d'attraction.

Les exploitants seront d'ailleurs des professionnels comme celui qui gère le salon de thé du Mont-Saint-Michel !

Les hôteliers écoutent avec méfiance les arguments de M. Cadet et se rassurent en sachant que l'opération «Paradores» dépend des crédits qui lui seront alloués et les circonstances ne se prêtent pas pour cette année, à une grande extension du budget des Affaires culturelles. Mais les régions pourront – et devront – apporter leur aide.


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