«Malraux ou Lucky Luke ?»

Sophie de Vilmorin, Aimer encore, Paris, Gallimard, 1999, p. 105-106 :

«Il est arrivé à cette époque-là [vers 1972] une chose amusante. La marque d’essence Total menait une grosse opération publicitaire qui consistait à offrir des livres à ses clients : six œuvres littéraires et six bandes dessinées, présentées par paires sur d’immenses affiches. Or La Condition humaine avait été couplée avec Lucky Luke ! André trouvait cette association tout à fait farfelue et donc épatante. Je me demande si ça ne lui rappelait pas ce que lui avait dit le général de Gaulle – et qu’il avait lui-même rapporté dans Les chênes qu’on abat : «Au fond, vous avez, mon seul rival international, c’est Tintin ! Nous sommes les petits qui ne se laissent pas avoir par les grands. On ne s’en aperçoit pas, à cause de ma taille.»

«Le remarquable dessinateur Eugène Collilieux travaillait à l’époque pour la maison qui allait imprimer les centaines de milliers d’ouvrages concernés, et c’est lui qui avait été chargé de faire signer à André Malraux l’accord pour l’édition en affiche de la photographie géante le représentant avec Lucky Luke.

«Il m’a raconté récemment qu’en voyant l’épreuve André Malraux lui avait dit :
– Vous avez mon accord.
Et, regardant le dessin de plus près :
– D’ailleurs, on se ressemble un peu !»

 

total

 La campagne publicitaire concernait aussi des magazines.

 

freund

«D’ailleurs, on se ressemble un peu !»