art. 138, avril 2012 • Christiane Moatti : «De “L’Espoir” au “Chant funèbre pour les morts de la guerre d’Espagne”» (PAM n° 1, 2001)

1939 : Sierra de Teruel est rebaptisé Espoir par un distributeur opportuniste, qui laisse croire que le film est une adaptation cinématographique du roman. Christiane Moatti, Professeur émérite à l'Université Paris III, montre qu'il n'en est rien : pour partager le même sujet et des procédés stylistiques équivalents, film et roman sont deux œuvres à part entière, dont les significations comme les enjeux diffèrent.

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L'unique réalisation cinématographique d'André Malraux, Sierra de Teruel, coincée entre deux drames du siècle, a subi un destin singulier : la guerre civile espagnole, qui s'acheva par la victoire de Franco, en avait dicté le sujet, et la Seconde Guerre mondiale arrêta sa diffusion, perturbant gravement la réception du film. Cette œuvre engagée, qui défendait la cause du gouvernement légal et combattait la propagande franquiste, n'atteignit pas son public. Le tournage du film avait commencé dans les studios de Barcelone sous les bombardements en juillet 1938, et dut être interrompu en janvier 39. Le montage posa bien des problèmes, puisqu'il dut s'effectuer à partir des scènes qui avaient pu être réalisées avant la débâcle des forces républicaines, Franco prenant le pouvoir à Madrid et déclarant la guerre officiellement terminée le 1er avril 1939.

Une projection privée eut lieu à la fin de juillet 1939 au cinéma Le Paris, sur les Champs Elysées, pour les membres du gouvernement espagnol réfugiés en France, puis au début d'août dans une petite salle des Champs Elysées une autre enfin « la semaine suivante dans le cinéma des grands boulevards […]. Le film fit grande impression », note le biographe Jean Lacouture. Mais la déclaration de guerre, le 3 septembre, allait détourner les Français de ce conflit sur la terre d'Espagne, qui avait été en quelque sorte « les grandes manœuvres » de la Seconde guerre mondiale. Le film fut aussitôt interdit par la censure, sa diffusion risquant de nuire au rapprochement diplomatique entre la France de Daladier, représenté par le maréchal Pétain, son ambassadeur, et l'Espagne de Franco.

 

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© Présence d’André Malraux sur la Toile / www.malraux.org

Texte mis en ligne le 26 avril 2012.

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