Philippe SAUZAY
Entre fe?vrier 1964 et janvier 1969, Monsieur Philippe Sauzay a e?te? charge? de mission puis conseiller technique au cabinet d'Andre? Malraux. Il a ve?cu de pre?s les retentissements que les e?ve?nements de Mai 68 ont occasionne?s au ministe?re des Affaires culturelles. Il confie en exclusivite? a? Pre?sence d'Andre? Malraux sur la Toile une passionnante analyse de ce moment e?trange de la vie politique et culturelle franc?aise, a? laquelle il joint ses souvenirs personnels te?moignant de la vive re?activite? qui régnait rue de Valois.
Malraux et le ministe?re des Affaires culturelles en Mai 68
(Premie?re partie)
A partir de la fin d'avril 1968 et surtout du de?but de mai ont lieu les premiers incidents qui ouvrent la pe?riode pendant laquelle, selon l'expression d'un journaliste, la socie?te? est mise en proce?s. Elle a e?te? ve?cue avec un me?lange d'amusement, lorsque les e?ve?nements quotidiens prenaient l'allure de farce (par exemple quand on apprenait que pour un franc les jeunes filles montraient leur intimite?), et de vague inquie?tude, au fur et a? mesure que la vie se compliquait du fait des gre?ves et de la paralysie progressive du pays. Avec bien entendu des re?actions de de?sapprobation et de re?volte lorsque e?taient annonce?es des violences sur les personnes et des destructions de biens, amplifie?es par les me?dias, principalement les radios, ou? les journalistes se complaisaient a? faire entendre dans leur micro leurs propres vocife?rations au cours des manifestations dont ils rendaient compte, e?maille?es des bruits les plus affolants, comme l'e?clatement imme?diat d'une grenade lacrymoge?ne lance?e par les forces de l'ordre et que l'auditeur avait l'impression de recevoir. Naquit aussi un sentiment de de?liquescence qui s'accroissait en raison du caracte?re inapproprie? des re?actions des pouvoirs publics : les services publics semblaient au fil des jours voue?s a? une paralysie progressive et irre?sistible, les agents de ces services adoptant une position d'attente, voire d'hostilite? au fur et a? mesure que le pouvoir s'enfonc?ait dans l'impuissance. On attendait, comme d'habitude, que de Gaulle intervienne et re?tablisse le calme, apre?s ce qu'on voulait conside?rer comme un interme?de pluto?t burlesque destine? a? le ta?ter et s'assurer de la vivacite? de ses re?actions. On pensait au vers de Voltaire : «Dieu parle, et le chaos se dissipe a? sa voix.» Le ge?ne?ral parut a? la te?le?vision le 24 mai pour annoncer un re?fe?rendum sur la participation. Cette intervention n'eut aucun effet et dans la nuit me?me e?clate?rent a? Paris des e?meutes avec des affrontements violents. Ainsi, Dieu parlait mais le chaos persistait. Pire, Dieu impuissant e?tait brocarde? ! Et par des Franc?ais de moins en moins indulgents qui se reprochaient soudain de vivre comme anesthe?sie?s dans une socie?te? mate?rialiste, mesquine, e?goi?ste et rabougrie, ce qui devenait insupportable aux plus jeunes y compris a? ceux qui e?taient issus de milieux favorise?s ou privile?gie?s.
Pourquoi et comment le ministe?re des affaires culturelles a-t-il e?te? me?le? assez directement a? ce mouvement ?
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La deuxième partie du témoignage de M. Sauzay constitue l’article 145 de Présence d’André Malraux sur la Toile.
© Présence d’André Malraux sur la Toile / www.malraux.org
Texte mis en ligne le 26 décembre 2012.
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