art. 135, avril 2012 • Paul Voorhoeve : «La participation de l’intelligentsia néerlandaise à la guerre civile espagnole» (PAM n° 1, 2001)

Eddy du Perron est l'ami néerlandais d'André Malraux, auquel il dédia La Condition humaine. Paul Voorhoeve, avant d'aborder le témoignage de du Perron sur cette singulière amitié dans le prochain numéro de Présence d'André Malraux, rappelle quel fut son rôle auprès de l'intelligentsia néerlandaise au moment de la guerre d'Espagne.

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L'écrivain néerlandais Eddy du Perron, dédicataire de La Condition humaine a été appelé, par Malraux, son « meilleur ami » dans Le Miroir des limbes. Esprit indépendant et individualiste il lui offrait, d'après Pascal Pia dans son livre Parler de du Perron (Utrecht, éditions Reflex, 1979), qui était à l'origine de leur amitié « […] une pierre de touche d'un grain exceptionnel. Pour s'assurer de la valeur d'une idée il trouvait en lui comme interlocuteur un garçon subtil, d'une franchise et d'une sincérité indiscutables et dont les réactions par conséquent étaient celles de l'individu le plus foncièrement loyal qui n'a pas d'autres intérêts à défendre que les intérêts  très généraux de l'esprit humain. » Pendant les années 1932-36, alors que les du Perron habitaient Paris, ils se rencontraient au moins une fois par semaine sinon presque quotidiennement. Du Perron a traduit La Condition humaine en néerlandais et c'est par sa médiation que Malraux fut une figure de proue parmi les cercles intellectuels de gauche indépendants aux Pays-Bas.

Bien que du Perron ait assisté au fameux Congrès des Ecrivains de 1935, il a été dégoûté par la dominance « communiste », tout en reconnaissant l'honnêteté de Malraux et de Gide. Malgré sa répugnance à se lier à un mouvement politique, il s'est engagé, à la demande de Malraux mais à contre cœur, à la fondation d'un Comité de Vigilance d'Intellectuels Antifascistes aux Pays-Bas.

Au début de 1936 les époux du Perron sont en train de préparer leur émigration vers les Indes néerlandaises, son « Pays d'origine » à lui. Ils n'ont pas pu trouver un emploi et ne peuvent guère vivre de leurs plumes, en outre eux espèrent y être à l'abri d'une guerre imminente et de la domination fasciste tant redoutée. Néanmoins, lorsque éclate la guerre d'Espagne du Perron veut s'engager activement. Il tente d'obtenir une carte de presse pour rejoindre Malraux à Madrid. Toutefois, comme il écrit dans une lettre à un ami :

« L'expédition espagnole n'a pas eu lieu, parce que Malraux est revenu brusquement, après n'avoir été qu'un jour et demi à Madrid. Il dit que la mentalité, le courage, etc. des « gauchistes » sont splendides, mais ils savent très peu de la tactique de la guerre moderne, et que cette guerre ressemble beaucoup à celle de Mexique. […] Hier, j'ai été sur le point de jouer « l'agent d'Espagne » en prêtant mon nom pour l'achat des 6 avions (soi-disant destinés aux Mexique). Le contrat était fait, mis en règle par le sous-directeur ; mais au dernier moment le directeur n'a pas marché ; parce qu'il est fasciste, naturellement. Le ministre de l'air, Cot, veut faire tout, mais il est sous contrôle de ses propres employés, qui lui font obstacle tout le temps. […] C'est à vomir. Hier soir Malraux était « ivre de dégoût » comme il disait. Il pense retourner en Espagne. »

 

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© Présence d’André Malraux sur la Toile / www.malraux.org

Texte mis en ligne le 22 avril 2012.

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