art. 161, juin 2013 • Jean-Claude Larrat : «Chamson et Malraux contre “l’uchronie”» (PAM n° 3, 2003)

André Chamson aurait pu être un personnage de Malraux. Romancier, essayiste et érudit – comme les intellectuels des Noyers de l’Altenburg –, militant antifasciste actif et convaincu, chartiste se donnant pour mission – comme le Lapez de L’Espoir –, de protéger le patrimoine artistique de la France pendant la guerre, résistant puis officier dans l’armée de la Libération, combattant aux côtés de Malraux à la tête de la Brigade Alsace-Lorraine, il devint, en 1959, directeur général des Archives de France. Sa première rencontre avec Malraux eut lieu en 1927, dans un ouvrage collectif, le numéro 70 des « Cahiers Verts » (la collection dirigée par Daniel Halévy chez Grasset), intitulé Écrits, où l’on trouvait également des textes de Jean Grenier, d’Henri Petit et trois poèmes de Pierre Jean Jouve. Malraux, nerveux, lyrique et quelque peu sibyllin, scrutait l’avenir de la «jeunesse européenne », tandis que Chamson dissertait sereinement sur l’étrange notion qu’il appelait (à la suite du philosophe français Renouvier) « uchronie ».

Si nous avons choisi de présenter ici ce texte de Chamson intitulé « L’Homme contre l’Histoire. Puissance de l’Uchronie », c’est que cette première « rencontre » avec Malraux ne fut pas une simple coïncidence sans lendemain. Cette réflexion sur l’Histoire, d’une étonnante modernité, a fort bien pu inspirer à Malraux les réserves qu’il a toujours gardées envers ces grandes philosophies de l’histoire qui ont séduit tant d’intellectuels et inspiré, au XXe siècle, tant de stratégies politiques catastrophiques.

Les invités d’une décade de Pontigny consacrée, en août 1928, aux « Jeunesses d’après-guerre» assistèrent à « la lutte de la hache et du pommier ». Malraux – la hache – se présentait comme « l’homme nouveau », ayant tranché toutes les amarres qui peuvent lier un individu à des ancêtres, un héritage, des traditions: famille, patrie, terroir, études, corporations, institutions… Chamson – le pommier – tenait à ses origines provençales; bien que partageant les idées progressistes et universalistes de la gauche intellectuelle d’alors, il voyait dans son attachement à la terre natale une composante essentielle et irréductible de son identité personnelle. La dédicace du texte de 1927 sur « l’uchronie » était d’ailleurs : « À ma femme. En notre fidélité à la Provence ».

 

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© www.malraux.org / Présence d’André Malraux sur la Toile

Texte mis en ligne le 10 juin 2013

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