Cela fait quelque quinze ans que certains chercheurs et écrivains ont commencé à se pencher sur la question du rapport de Malraux avec la Shoah (mot hébreu désignant depuis trente ans l'Holocauste des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale) ouvrant ainsi la problématique que pose sa mémoire des camps de concentrations par rapport à son silence sur l'extermination des Juifs dans son œuvre.
De l'Holocauste en tant que tel, il n'a donc que fort peu parlé et n'a jamais employé le mot – du moins dans un texte écrit ni non plus, à notre connaissance, dans aucun entretien. La première fois et sans doute la seule, où l'écrivain nomma la catastrophe juive fut dans sa préface à …Qu'une larme dans l'océan de Sperber : «L'extermination systématique des Juifs a vidé les petits villages de la Pologne orientale…» (Calmann Lévy, 1952, cité aussi in Michaël de Saint-Cheron, Malraux et les Juifs, histoire d'une fidélité, DDB, 2008).
Pour Annette Wieviorka, ce silence se comprend par la société des années soixante et soixante-dix, non seulement en France mais aussi dans tout l'Occident, dans laquelle vivait André Malraux. Il n'y avait pas de mot en ce temps, epochemachend, qui fait date, pour décrire l'immensité du désastre de la Shoah. Les penseurs non-juifs qui en avaient compris l'ampleur étaient fort minoritaires. Levinas n'affirmait-il pas, dix ans après la mort de Malraux, que l'événement ne pouvait « se loger dans la conscience humaine comme une image, ni se trouver en français un nom qui le désignât à sa mesure. » (« Le Carmel d'Auschwitz », Le Figaro, 14 avril 1986).
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© Présence d’André Malraux sur la Toile / www.malraux.org
Texte mis en ligne le 5 novembre 2011