Image of Art. 271, novembre 2021 | document • Neda Sharifi : « Entretien Malraux- Khânlari (1958), traduction » – inédit en français

Parviz Nâtel Khânlari (1914-1990)

Art. 271, novembre 2021 | document • Neda Sharifi : « Entretien Malraux- Khânlari (1958), traduction » – inédit en français

Malraux : Votre analyse est juste. Notre temps n'est pas celui du roman. C'est pour cela que le roman, au sens strict, n'est plus pratiqué comme auparavant. Ceux qui écrivent des romans appliquent plutôt des formes narratives dans leurs propres œuvres. Je ne veux pas dire que cette manière est inadéquate. Dans l'histoire du roman, les écrivains l'ont fait plusieurs fois. Mais la réussite n'est pas certaine sur ce chemin. Quelques fois cela aboutit à un bon résultat et à un progrès dans l'art d'écrire le roman ; certaines fois cela conduit à un échec et à l'affaiblissement du roman.

Khânlari : Mais vous n'avez pas dit pour quelle raison le roman n'est plus aussi répandu qu'auparavant. Pourquoi, de nos jours, les lecteurs n'ont-ils plus autant d'intérêt à lire des romans qu'aux époques précédentes ?

Malraux : C'est parce que d'autres choses ont remplacé le roman. Vous penseriez tout de suite au cinéma, à la radio et à la télévision. Mais ce n'est pas cela. Ceux qui rivalisent avec le roman à notre époque, ce sont les faits divers dans les journaux. Ne soyez pas étonné de ces propos. La structure de chaque roman n'est composée que de quelques incidents inattendus. Prenons comme exemple l'un des romans de Balzac qui fait partie de l'un des meilleurs modèles de ce genre. Si on laisse de côté les pensées de l'auteur et certaines descriptions qui ne constituent pas les principes du roman, que reste-t-il ? Une princesse qui est amoureuse d'un jeune homme indigent. Il existe également quelques coïncidences et quelques actions banales dont la succession laissent perplexe. Et ce sont ces éléments qui attirent l'attention du lecteur et qui suscitent ses émotions et sa curiosité.

À l'époque de Balzac, les journaux ne consacraient pas de colonnes ou de pages à la publication de ce type de nouvelles. Les gens recouraient au roman pour satisfaire leur besoin naturel et leur curiosité. À présent, chacun trouve quelques faits divers dans le journal qu'il lit le soir ; c'est pourquoi il n'est plus obligé de lire un roman pour cela.

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